Laissez-moi vous faire une petite mise en contexte. Depuis quelques années maintenant, nous avons instauré à la MRC de Maskinongé, un mur des « Bons coups ». Chaque mois, un comité créé à cet effet identifie le « bon coup » mensuel et une entreprise y est honorée pour un investissement, un agrandissement, une innovation ou tout autre événement digne de mention. La photo de cet entrepreneur est ensuite fièrement affichée sur ce mur pour un an.
Me voici donc à chercher de l’information sur l’entreprise méritante du mois d’août 2015 afin de rédiger la base du communiqué de presse que je pourrai compléter en appelant l’entrepreneur. Cette entreprise a aujourd’hui 75 ans. C’est pas rien 75 ans. Cet âge vénérable mérite admiration et reconnaissance. Mais oh choc absolu pour une accroc d’Internet et des médias sociaux comme moi, aucun site web, pas de page Facebook, pas de fil de presse… Et pourtant, on connaît tous l’entreprise de Sainte-Ursule. Me voici donc, stylo à la main, questions à la bouche et téléphone au poing, afin d’écrire l’Histoire avec un grand H de notre récipiendaire de fin d’été.
Et là….
Dès les premières paroles échangées,
Comme suspendue dans le temps, comme si une musique intemporelle m’envahissait le cerveau, j’oublie mes questions; je me tais; j’écoute; je sens; je vois et je vis cette histoire… Leur Histoire… Bien loin du Net et des médias sociaux…
On est en 1940. Je vois la scène en noir et blanc, comme dans un film de l’époque. J’imagine le temps maussade, l’air froid. Amable Baril et Noëlla Bédard n’ont rien dans les poches mais un rêve au cœur et une volonté à toute épreuve de le réaliser. Ils louent une petite maison à Sainte-Ursule et dès lors, c’est la mise au monde de la Boulangerie Baril à même la maison. Les citoyens de Sainte-Ursule et des environs se rappelleront l’excitation dans le regard des enfants quand le camion Baril approchait la porte de leur maison avec ses bonnes odeurs, ses saveurs, ses trésors sucrés.
C’est Dominic, le petit fils du couple Baril qui me raconte cette histoire, son histoire. Il me parle de sa grand-mère avec tant de fierté et d’admiration que l’émotion m’envahit. Au bout du fil, je peux sentir ces effluves de pain, de bois, d’époque. Je ferme les yeux et peux voir le film du temps.
En 1965, Réjean, le fils du couple, prend la relève de l’entreprise familiale avec sa femme Esther, puis, quelques années plus tard, ses deux fils Dominic et Patrick se joignent à eux. Ensemble, ils font prospérer l’entreprise familiale. Et même si aujourd’hui leurs produits se vendent dans les magasins, même s’ils ont diversifiés leur inventaire et qu’au pain s’est ajouté la pâte à tarte, à pizza, toujours les fameuses fêves au lard, les pâtisseries… Même si maintenant, une quinzaine d’employés mettent la main à cette pâte et que la 4e génération de Baril n’est pas loin derrière… Les camions de livraison sillonnent toujours les rues de Sainte-Ursule et des environs et si vous fermez les yeux, l’espace d’un moment, vous verrez Noëlla et Amable, sourires en bouche, brasser ensemble les ingrédients nécessaires à faire monter la pâte : l’amour, la confiance, le rêve et beaucoup, beaucoup, beaucoup de travail. Bon 75e à la Boulangerie Baril et longue vie !